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Gestion de projet

Projet VS Produit : quelles différences et quelles erreurs ne pas faire ?

Lucas Adell

·12 min

Dans cet article nous allons plonger dans une question fondamentale et souvent mal comprise : quelle est la différence entre la gestion de projet et la gestion de produit ?

Cette distinction est essentielle, non seulement pour les professionnels de notre domaine, mais aussi pour vous qui envisagez de transformer vos idées innovantes en réalités numériques. Comprendre ces différences peut grandement influencer la réussite de votre projet ou de votre produit.

Cet article vise à démystifier ces deux concepts, en soulignant leurs particularités et en vous guidant sur les erreurs à éviter.

Que vous soyez à la tête d’une startup en plein essor ou d’une entreprise établie cherchant à numériser ses outils, cette exploration vous fournira les clés pour mieux comprendre comment nous pouvons travailler ensemble pour réaliser vos ambitions de manière efficace et stratégique.
Alors, découvrons ensemble comment une approche adaptée à vos besoins peut faire toute la différence dans le succès de vos projets numériques.

Cahier des charges VS Backlog.

Quelque soit la l’approche utilisée pour développer une solution, il faut avoir une idée claire (plus ou moins) de là où on veut arriver, et surtout comment.

En Product Management (management de produits), pour le développement d’un MVP (Minimum Viable Product ou produit minimum viable), le Product Manager va identifier les fonctionnalités clés qui permettront de fournir le plus de valeur possible à l’utilisateur à l’aide des outils permettant une scalabilité (capacité d’un système informatique à s’adapter d’un point de vue dimensionnel à des tailles tant inférieures que supérieures tout en gardant ses fonctionnalités de base) optimale, et sur les conseils de son Technical Leader, ou quelque soit le nom que vous donnez à l’expert technique de votre équipe.

Les produits issus du Product Management ont vocation à évoluer.

Le MVP est par nature une base. Ce n’est pas un prototype, mais une version épurée qui doit montrer le potentiel du produit. Il doit délivrer assez d’utilité aux utilisateurs qu’il vise à conquérir pour en faire des early adopter.

À cet effet, un backlog est constitué. Contrairement à un cahier des charges (sur lequel je reviendrais plus tard), le backlog ne contient pas de visions détaillées des fonctionnalités, ni de wireframes, ni de designs et aucune définition des solutions techniques utilisées. Ces informations viendront après, lorsque le développement aura démarré. Elles seront affinées de façon incrémentale à mesure que le produit se construira. En tout cas c’est la théorie.

Dans les faits, le Product Manager commence déjà à imaginer les logiques fonctionnelles répondant aux user stories qu’il a ajouté au backlog. Les développeurs commenceront à imaginer des réponses techniques au moment où ces fonctionnalités leurs seront présentées. Ils choisiront des solutions avec lesquelles ils sont déjà familiers pour les mettre en œuvre le plus rapidement possible. On ne part que très rarement d’une feuille blanche et les phases de R&D et de Discovery ne sont généralement pas très longues, à moins de chercher à avoir une approche profondément disruptive ou que le produit soit assez innovant pour en avoir besoin.

Dans l’approche Produit le backlog est donc plutôt lacunaire au lancement du développement (on inclut ici aussi la conception UI/UX qui se fait en parallèle ET en collaboration avec les développeurs et le Product Manager).

À l’inverse, dans l’approche projet, le cahier des charges doit être beaucoup plus précis dans les éléments qu’il présente. Et pour cause, dans de nombreux cas le projet est une commande d’un client et une non-conformité entre le produit livré et le cahier des charges peut être cause de litige.

En conséquence, toutes les phases préliminaires au développement : la phase de cadrage, la conception UX/UI et la rédaction des spécifications fonctionnelles et techniques, prennent une importance cruciale car elles cadrent l’intégralité de la phase de développement.

Ainsi, chaque point non prévu qui surgirait durant le développement donnerait lieu à une négociation entre le chef de projet et son commanditaire afin de trouver un terrain d’entente, généralement une rallonge financière, une simplification des spécifications attendues et/ou un report des deadlines.

Le produit livré doit être un produit fini. Les problématiques de scalabilité ne s’appliquent généralement pas dans ce type de projet car le cadrage prévoit déjà une “charge critique” et l’architecture de la solution ne doit pas forcément être pensée pour accueillir de nombreuses évolutions et nouvelles fonctionnalités, mais pour être déployée le plus rapidement possible, planning oblige.

Le cas de la roadmap.

Le planning, qui est généralement un rétroplanning, est donc une extension sinon une partie intégrante du cahier des charges.
Deux facteurs sont clés en gestion de projet : le budget et les retards.

Le premier doit être maximisé et le deuxième minimisé sous peine d’avoir une incidence sur le premier : un retard dans la livraison peut donner lieu à des pénalités de retard ou à du temps de développement supplémentaire à la charge de l’équipe projet.

Dans le contexte de la gestion de projet, le planning joue un rôle fondamental. Il s’agit d’un outil détaillé qui guide l’exécution des tâches, la gestion des ressources, et le respect des échéances. Un planning clair et efficace est essentiel pour assurer que toutes les composantes d’un projet soient achevées de manière systématique et ordonnée. Il permet de définir clairement les délais, les responsabilités et les objectifs à court terme. Cette planification rigoureuse est cruciale pour le succès du projet car elle permet de prévoir et de gérer les risques, de suivre les progrès, et d’assurer que le projet reste dans les limites du budget et du calendrier prévus.

Dans la gestion de produit, la roadmap occupe une place centrale mais son rôle est différent. La roadmap de produit est un outil stratégique qui présente une vision à long terme du développement d’un produit. Elle ne se concentre pas sur les détails spécifiques des tâches ou les échéances immédiates, mais plutôt sur la direction générale et les objectifs à long terme du produit.

La roadmap aide à communiquer la stratégie et les priorités du produit aux parties prenantes, à aligner les efforts de l’équipe de développement avec les objectifs commerciaux de l’entreprise, et à répondre aux évolutions du marché et aux besoins des clients. Elle est essentielle pour maintenir une vision cohérente du produit tout au long de son cycle de vie et pour s’assurer que le produit continue d’évoluer de manière à répondre aux attentes du marché.

En conclusion, bien que le planning en gestion de projet et la roadmap en gestion de produit soient tous deux des outils clés, ils servent des objectifs différents.

Le planning est crucial pour la gestion opérationnelle et la réussite à court terme d’un projet spécifique, tandis que la roadmap est indispensable pour la vision stratégique et le succès à long terme d’un produit. Le premier est orienté vers la précision et le contrôle, tandis que le second se concentre sur la flexibilité et l’adaptation stratégique.

Une mesure de la performance différente.

Dans le cadre du Product Management, l’évaluation de la performance est basée sur l’impact et la valeur générée pour l’entreprise et ses clients.
Cela s’illustre chez le Product Manager par la compréhension profonde des besoins des utilisateurs, de la vision produit, et de la capacité à piloter l’équipe produit vers la réalisation de cette vision tout en maximisant la valeur commerciale.

Marty Cagan (fondateur du Silicon Valley Product Group en 2001 et figure emblématique du Product Management) insiste sur l’idée que les Product Managers doivent avant tout se concentrer sur la résolution de problèmes réels pour les utilisateurs, en créant des produits non seulement désirables mais qui répondent également à des besoins non satisfaits.

La performance d’un Product Manager est donc mesurée par sa capacité à identifier ces opportunités uniques, à définir une vision produit claire, et à mener l’équipe produit à transformer cette vision en réalité.

Cela implique un processus continu d’apprentissage et d’adaptation, où la validation des hypothèses et l’itération rapide sur la base des retours utilisateurs sont clés. La performance d’un Product Manager est également liée à sa capacité à travailler efficacement avec les équipes de développement, de design, et les autres parties prenantes pour assurer que tous avancent dans la même direction. Cela inclut la communication efficace de la vision produit, la priorisation des fonctionnalités basée sur une compréhension approfondie des besoins des utilisateurs et des objectifs commerciaux, et la gestion agile du processus de développement pour répondre rapidement aux changements.

En résumé, la performance se reflète dans la satisfaction des utilisateurs, l’adoption du produit, et l’impact commercial global, témoignant de la capacité du PM à traduire sa vision produit en réalité tangible.

Dans le cadre de la gestion de projet numérique, évaluer la performance dépasse la simple observation des délais et des budgets. Il s’agit d’une analyse complexe qui inclut la qualité des livrables, la satisfaction des parties prenantes et l’utilisation efficace des ressources.

La capacité à respecter les délais est, comme déjà évoqué, cruciale ; elle se mesure par la comparaison de l’avancement réel du projet avec le planning initial, permettant d’identifier et de gérer les retards.

La maîtrise du budget, quant à elle, est surveillée via des indicateurs tels que le Cost Performance Index (CPI), qui compare les coûts réels aux prévisions budgétaires.

La qualité des livrables est évaluée par rapport aux standards définis en début de projet, en utilisant des méthodes comme les tests de fonctionnalité, les revues de code, et les audits de sécurité.

La gestion du scope assure que le projet ne s’écarte pas de ses objectifs initiaux, tandis que la satisfaction des parties prenantes est mesurée à travers des enquêtes et des réunions de feedback, reflétant la perception de la valeur ajoutée par le projet.

Chacun de ces aspects contribue à une compréhension globale de la performance d’un projet digital, permettant aux gestionnaires de projet d’identifier les domaines nécessitant des améliorations et d’ajuster leurs stratégies pour mieux répondre aux attentes des clients et des autres parties prenantes. Cette approche holistique est indispensable pour naviguer dans l’environnement complexe et en évolution rapide des projets numériques.

 

En définitive, la mesure de la performance en gestion de projet et en gestion de produit présente à la fois des différences et des similarités significatives.

Dans la gestion de projet, la performance est souvent évaluée par des indicateurs quantitatifs tels que le respect des délais, le contrôle des coûts, et la qualité des livrables, reflétant une approche axée sur l’efficacité opérationnelle et la conformité aux objectifs spécifiques du projet.

En revanche, dans le product management, la performance est mesurée de manière plus qualitative, centrée sur l’impact sur le client, l’innovation, et la création de valeur à long terme, mettant l’accent sur la compréhension des besoins des utilisateurs, la vision produit, et l’efficacité du processus de développement.

Toutefois, les deux domaines partagent des similarités dans leur accent sur l’importance de la collaboration d’équipe, de la gestion des ressources, et de l’adaptation aux changements, soulignant une approche commune axée sur l’atteinte d’objectifs tout en répondant aux attentes des parties prenantes.

Faire du produit pour le compte d’un client.

L’utilisation d’un framework de product management, tel que Scrum, dans le développement d’une solution numérique pour un client, soulève des enjeux spécifiques qui nécessitent une attention particulière pour assurer le succès du projet. Ces frameworks, axés sur l’agilité et la flexibilité, modifient la manière traditionnelle de gérer les projets, en plaçant l’accent sur l’adaptabilité et la collaboration continue.

L’implication des développeurs et des designers doit se faire dès les premières étapes du projet.

Dans un framework agile, leur rôle ne se limite pas à la simple exécution technique ; ils contribuent activement à la conception et à l’évolution du produit. Une collaboration étroite et précoce avec ces équipes permet d’identifier les contraintes techniques et les opportunités de design dès le début, facilitant ainsi un développement plus fluide et cohérent avec les attentes du client.

Plutôt que de vendre un cahier des charges fixe, il est souvent plus judicieux de présenter un backlog de produit au client. Ce backlog, constamment mis à jour et re-priorisé, reflète une compréhension flexible des besoins du client et peut s’adapter aux changements tout au long du projet. Cette approche permet une plus grande réactivité aux retours et aux évolutions du marché, garantissant ainsi un produit final plus en phase avec les attentes réelles des utilisateurs finaux.

Enfin, il est crucial d’adopter une approche de “missionnaire” plutôt que de “mercenaire” lors de la collaboration avec les clients. Cela signifie évangéliser le client à la culture produit, en l’impliquant activement dans le processus de développement et en lui faisant comprendre l’importance de la flexibilité, de l’itération et de la réactivité dans le développement de produits numériques. Cette éducation aide les clients à s’aligner sur une vision produit plus dynamique et orientée vers l’utilisateur, favorisant une relation de partenariat à long terme plutôt qu’une simple transaction.

En résumé, les projets menés avec une philosophie “Product” plutôt que Projet exigent une approche adaptative, une implication précoce des équipes de développement et de design, une préférence pour un backlog évolutif, et un engagement à inculquer au client une culture de produit agile. Ces éléments contribuent ensemble à la réussite d’un projet numérique, en assurant que le produit final répond non seulement aux besoins actuels du client mais est également adaptable aux exigences futures.

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