Projets en méthode agile, une facturation au forfait est‑elle possible ?
Conduire un projet numérique en méthode agile est devenu aujourd’hui presque indispensable. Avec des périmètres projets qui évoluent rapidement, des clients qui réclament des “POCs” (Proof Of Concept) à développer en quelques semaines, il est nécessaire d’avoir un mode de fonctionnement flexible basé sur l’expérimentation. Une méthode qui fait ses preuves, mais qui est souvent confrontée au même problème : comment facturer les projets? En régie ou au forfait ?
La facturation en régie, un choix plus sûr pour les agences.
C’est la méthode de facturation la plus plébiscitée pour la facturation des projets agiles. En mode régie, c’est le temps que l’on consacre au projet qui est facturé. Un TJM (un tarif jour) est associé à chaque profil et on comptabilise le nombre de jours consacrés au projet chaque semaine, chaque mois, …. Cette méthode s’adapte au caractère itératif et progressif du projet avec un engagement de mise à disposition de ressources et non de résultat. Le rêve non ? Oui sauf que dans ce cas c’est le client qui prend tout le risque financier et de fait il n’est souvent pas très “chaud” à vouloir signer. Et cerise sur le gâteau, avec ce schéma les équipes ne font généralement pas preuve de pugnacité pour se dépasser sur le projet.
La facturation au forfait, un choix plus sûr pour les clients.
À l’inverse, l’approche forfaitaire se base sur une logique de contraintes. Afin de s’engager sur un périmètre donné avec un engagement de résultat et un coût fixe, il est important de déterminer avec précision, avant le démarrage du projet, chaque fonctionnalité et le résultat final attendu. L’opposé de l’agilité en somme. Dans cette méthode les clients ont tendance à blinder leurs arrières en chargeant la mule pour faire passer un maximum de fonctionnalités dans un budget souvent tiré vers le bas par les agences. Et oui, il ne faudrait pas perdre un potentiel client.
Alors est-il possible de combiner méthode agile et facturation au forfait ? Une combinaison qui permet de garantir une sécurité à la fois pour le client et l’agence tout en gardant une logique d’un produit itératif basé sur l’expérimentation ?
Forfait et agilité, une histoire de compromis.
Comme dans toutes relations amoureuses, il est souvent question de compromis. Ici les compromis se placent à plusieurs niveaux : contractuel, fonctionnel et prises de risques.
Des compromis contractuels
Plutôt que d’établir un contrat strict, mieux vaut conserver une certaine souplesse. On peut parler de contrat agile où client et agence supportent équitablement les risques. C’est principalement le mode de facturation qui va être revu ici. Par exemple, il est possible d’établir une estimation sur la base des ambitions du projet et de prévoir des clauses dans le cas où celui-ci est terminé en avance ou en retard.
Dans le cas où le projet est terminé en avance, il est envisageable de spécifier que le client ne paye que ⅓ des mois restants. Cela offre une économie importante pour le client et une marge brute supplémentaire pour l’agence.
Scénario A : le projet se termine en avance
Au contraire, en cas de retard, il peut être convenu de réduire les coûts de 50%, client et agence supportant ainsi les dépassement. Ce type de contrat est souvent appellé : “Money for Nothing, Changes for free”. Le meilleur moyen de conserver agilité et incentive.
Scénario B : le projet se prolonge au délà des estimations initiales
Un backlog variable
Les compromis vont également pouvoir se jouer au niveau du backlog. Pour simplifier, c’est un peu la liste de courses des clients et des fonctionnalités attendues dans la solution. Pour chaque item du backlog, on attribue un nombre de points qui permet de déterminer le degré de complexité de la fonctionnalité. Pour garder une certaine souplesse, il est possible d’offrir au client la possibilité de modifier les fonctionnalités prioritaires en cours de route mais uniquement pour un nombre de points équivalent. Par exemple : une fonctionnalité estimée à 10 points ne pourra pas être remplacée par une fonctionnalité à 20 points.
Évaluer la prise de risque et le niveau d’incertitude
L’incertitude est la pierre angulaire de tout projet. C’est le degré d’incertitude et d’imprévus qui va influencer négativement ou positivement un projet : son facteur risque. En tentant d’évaluer le plus précisément les risques du projet et d’anticiper les éventuels portes de sorties on réduit les risques de compromettre un projet.
Pour adopter un modèle de fonctionnement hybride entre méthode agile et forfait, il est essentiel d’instaurer une confiance mutuelle entre client et agence. C’est le meilleur moyen d’avoir des objectifs communs et de travailler en bonne intelligence sans un rapport de force par l’un ou par l’autre. Un fonctionnement qui permet de prendre les bonnes décisions au bon moment donc de réduire les risques.
Un projet agile facturé au forfait est donc possible. Pour cela il faut construire une équipe projet entre l’agence et le client entièrement basée sur la confiance. La relation doit être transparente avec des compromis clairs. La facturation au forfait ne s’adapte pas à tous les projets et il est nécessaire de bien évaluer les objectifs pour en mesurer les risques.